#Mondochallenge Nos plus belles années

Article : #Mondochallenge Nos plus belles années
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7 avril 2017

#Mondochallenge Nos plus belles années

On t’a dit de sourire, pas d’imiter un requin…
Tu parles de qui ? La fille avec les dents écartées là ?
C’est une photo de classe donc tu dois y être mais s’il te plait range tes dents !

Quand je pense à mes années collège et lycée, ce sont les premières choses qui me viennent à l’esprit. Ce n’est pas juste de résumer sept années en seulement trois phrases. Et pourtant ce sont mes premiers souvenirs.
Je savais que l’entrée au collège marquerait un nouveau tournant dans ma vie mais pas de la manière dont je le pensais. Mes parents allaient enfin me laisser garder mes cheveux, j’aurai enfin des seins et maman allait m’acheter un soutien gorge comme à ma grande sœur. En plus j’intégrais une nouvelle école, un nouvel internat. J’allais me faire de nouveaux amis. Cela ne m’effrayait pas parce que j’étais tout sauf une enfant timide. Mais au lieu de s’extasier sur mon nouveau sac comme je m’y attendais, la première chose que ma voisine de table demanda fut « pourquoi tes dents sont comme ça ? »

C’est la première fois qu’on me faisait une telle remarque. Je n’avais pas de réponse mais cette question m’a fait comprendre que j’étais différente. En classe, j’avais la réponse aux questions mais je n’osais plus lever la main de peur que les autres découvrent ce que ma voisine a vu. J’ai essayé de trouver chez mes parents une réponse à la question de ma voisine mais  ils ont préféré minimiser le problème. Il fallait s’accepter tel qu’on était. J’avais beaucoup de mal à me faire des amis non pas parce qu’ils étaient tous méchants mais parce que moi j’étais mal dans ma peau.

Les seins que j’attendais avec tant d’impatience sont enfin apparus mais personne ne m’avait expliqué que cela s’accompagnait de douleurs atroces à la fin de chaque mois ! Le comble, ils n’étaient même pas assez gros pour que j’ai un soutien gorge. Si c’était le prix à payer je voudrais pouvoir revenir en arrière, à l’époque où ma plus grande préoccupation était de deviner si mon cadeau de Noël serait une poupée ou une peluche.

Je voyais mon corps se transformer et je n’y comprenais pas grand chose. Les bonnes sœurs chez qui j’avais grandi avaient l’art d’éviter ces questions. Elles se contentaient de répéter, « à votre âge, les garçons c’est dangereux ». C’est donc pour ça que le collège était exclusivement féminin. Il faut donc travailler dur pour aller au lycée. Puisqu’on y mélange les garçons et les filles, il faut croire que quand on est lycéenne, on ne court plus aucun danger.

Mes parents non plus n’apportaient pas de réponse à mon esprit curieux. Mais mon père me donna le plus sage des conseils. « Tout ce dont tu as besoin, c’est de savoir que de la vie se trouve dans les livres ». Et moi j’avais besoin de savoir beaucoup de choses. La lecture est devenue alors mon passe temps favori. Cela m’évitait par la même occasion d’avoir à me faire des amis. Le bon coté de ces heures passées à la bibliothèque était évidemment mes excellents résultats scolaires. Et malgré le fait que je me cachais dans mes livres, les autres venaient à moi. La fille qui gâche les photos avec son sourire est devenue la fille qui avait souvent les réponses. Parfois le professeur discutait avec moi comme avec une grande personne. Et alors, malgré moi, je souriais. Les gens jugeaient enfin l’ensemble et pas seulement ce qui est visible au premier regard.

Des années plus tard, je repense à cette époque où un ensemble de changements se sont opérés en si peu de temps et je me dis que je n’étais pas vraiment différente de la fille la plus populaire, du joli garçon dont nous rêvions toutes ou encore du pagailleur qui s’attirait tous les jours les foudres du directeur. La vérité, c’est que chacun de nous essayait de découvrir quelle genre de personne il ou elle était et surtout comment se faire accepter des autres. Pour la plupart, nous étions mal dans notre peau pour des raisons qui aujourd’hui sont d’une banalité évidente. Alors nous essayions de cacher cela comme nous pouvions, qui derrière une timidité maladive, qui derrière une assurance qu’il ou elle était loin de ressentir.

Mais ce que nous aurions dû savoir, ce que j’aurais aimé comprendre à ce moment-là, c’est que tout cela est temporaire et que toutes ces bonnes et mauvaises expériences forgeaient la personne que je deviendrai. On garde le souvenir des choses blessantes parce que c’est généralement la première fois qu’on est confrontés à la réalité sans les enjoliveurs de l’enfance. Et la première fois fait toujours mal.

La réalité c’est que même ceux que l’on considère comme les méchants avaient peur. On l’appréhende différemment mais on est tous terrifiés par cette intense période du passage de l’enfance à l’âge adulte. C’est à ce moment qu’on apprend la réelle définition du mot grandir. C’est pour cela que même ceux qui avaient l’air d’être les plus heureux ne vous diront pas que ce sont leurs plus belles années. Mais quand on y repense : est-ce que c’était aussi terrible que ça ? Non. C’est au collège que j’ai rencontré ma meilleure amie. C’est au lycée que j’ai choisi le métier que j’allais exercer. J’ai lu des livres qui m’ont positivement marqué et bien sûr j’ai eu mon premier soutien gorge ! Est-ce que finalement ces années collège et lycée que nous décrivions pour la plupart comme pénibles n’étaient pas nos plus belles années ?

C’est vrai, je me faisais une véritable joie d’en finir et d’entrer enfin à l’université qui dans mon esprit enfant-adulte était synonyme de liberté mais la réalité une fois encore est bien loin de ce qu’on imagine…

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