Bénin : un regard sur la Lépi à la veille des législatives
Une fois n’est pas coutume, nous aborderons aujourd’hui un sujet d’ordre politique au Bénin. Il s’agit de la fameuse Liste électorale permanente informatisée (Lépi). De la phase de projet à sa réalisation, cette liste a fait couler beaucoup d’encre et de salive. Mais tout semble indiquer qu’elle est enfin disponible et pourra être utilisée pour les prochaines élections législatives prévues pour le 26 avril 2015.
Les objectifs de la Lépi
La Lépi se veut un outil moderne de gestion administrative. Si comme l’indique le président du COS-Lépi (Conseil d’orientation et de supervision) elle est « transparente, exhaustive, consensuelle et sincère », la Lépi devrait permettre d’alléger les lourdeurs administratives et surtout faciliter le processus électoral. Au regard de la courbe de croissance démographique au Bénin l’effectif provisoire de 4 598 000 électeurs répartis dans 7908 centres de votes semble plausible. Mais il a fallu du chemin pour en arriver là.
Un sujet à polémique depuis 2011
Depuis sa mise en place en 2011, la Lépi a été un objet de division au sein du peuple. Par mauvaise foi, ignorance ou mauvaise information, de nombreux citoyens n’ont pas été recensés. Résultats des courses; des plaintes et protestations à coups de marche et de grève (la marche est notre sport préféré au Bénin). Fort heureusement « la maturité du peuple » a permis de tenir des élections dans la paix et l’unité nationale. Depuis à travers le COS-Lépi instauré en 2013, le gouvernement s’est engagé à fournir une version améliorée de ce document administratif.
De la Léip à la Lépi
Le Conseil d’orientation et de supervision de la Lépi est un organe très souvent critiqué au Bénin principalement à cause du non-respect des délais annoncés. A sa décharge, il faut reconnaître qu’il n’est pas aisé de calmer les ardeurs des «Béninois engagés ». Après un long processus de correction (audit participatif, enregistrement, dédoublonnage…) et la participation des opérateurs technologiques OPENVISTA, GEMALTO et ZETES, le COS-Lépi a mis à la disposition des Béninoises et Béninois la Léip entendez Liste électorale informatisée provisoire. Un mois plus tard le 25 février 2015, le document est enfin disponible au grand soulagement des électeurs, observateurs et acteurs politiques. Mieux encore, la liste a été publiée et peut être consultée sur le site officiel du COS-Lépi. On serait tenté d’applaudir mais « tant qu’il y a à faire, c’est comme si rien n’est fait ». Et dans le cas de présent, il y a encore beaucoup de pain sur la planche.
Des insuffisances criantes
Dans sa déclaration portant publication de la Lépi, Sacca Lafia a lui-même souligné les insuffisances de ce document notamment :
- 206 centres de vote fixés par la loi avec moins de cinquante citoyens enregistrés et en âge de voter répartis dans tous les départements.
- 7 villages créés avec les centres de vote clairement définis par la loi ont zéro citoyen enregistré en âge de voter dans 5 départements
- L’absence sur cette liste des Béninois de la diaspora qui ne pourraient être pris en compte qu’à partir de juillet 2015.
Par ailleurs, il faut noter qu’à la date du 4 mars où le COS-Lépi a transmis la liste et les documents électoraux à la Céna (Commission électorale nationale approfondie ), la procédure de radiation de la liste des personnes décédées est toujours en cours. Ce qui suggère qu’il sera établi des cartes d’électeurs au nom de personnes décédées. Sacca Lafia estime que : « L’attente a été longue, l’accouchement difficile, mais heureux ». Il a toutefois oublié de mentionner à quel point la note est salée. En effet, après un financement de 14 milliards de francs CFA, le COS-Lépi réclame à la date du 1er avril 2015 (à quelques jours des législatives) pas moins de deux milliards supplémentaires. Selon Sacca Lafia invité sur Canal 3, ce nouveau financement est « nécessaire » pour la distribution des cartes d’électeurs et le règlement de certaines dettes.
Je salue évidemment les efforts du gouvernement en place pour avoir eu l’idée d’informatiser le fichier électoral, mais le résultat final me semble quelque peu décevant au regard de l’investissement engagé. Les insuffisances relevées sont la preuve qu’il nous reste encore du chemin au Bénin avant de comprendre le thème « informatisé ».
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